Association Lupus Erythémateux

15 questions concernant les problèmes cardio-vasculaires dans le lupus

Cet article ne concerne que le lupus systémique et non celui uniquement limité à la peau. Il faut souligner que les problèmes cardio-vasculaires touchent précocement les malades lupiques, et cela à partir de la fin de la quarantaine alors que dans la population générale c’est largement 10 ans plus tard. C’est donc un problème majeur dans cette maladie, notamment pour les femmes d’autant plus qu’une partie de celles-ci sont ménopausée plus tôt soit à cause du lupus, soit à cause des traitements et qu’elles ont donc perdu l’effet cardioprotecteur des oestrogènes.

Adaptation et traduction du texte original par le Dr Pascale Cortvriendt

Retrouvez la version originale du texte en anglais sur le site de la Lupus Foundation of America

1. Dans le lupus, quelles sont les différentes parties du cœur qui sont le plus souvent concernées ?

Le lupus peut toucher les différentes parties du cœur. Le péricarde (l’enveloppe entourant le cœur) est la région la plus fréquemment atteinte par l’inflammation. Celle-ci est appelée « péricardite » et donne une douleur dans la poitrine qui augmente en position couchée, à la respiration profonde et peut être atténuée en se penchant en avant. Le lupus atteint plus rarement les valvules cardiaques ainsi que le muscle cardiaque lui-même (myocardite).
Mais l’atteinte dont il faut le plus tenir compte dans le lupus est l’atteinte des artères coronaires (artères nourricières du cœur) qui en se bouchant, provoque un infarctus. Ce phénomène est provoqué par différents facteurs comme l’inflammation chronique, la dyslipidémie (LDL-mauvais cholestérol- trop élevé/HDL- bon cholestérol- trop bas dans le sang), l’obésité et l’inactivité physique. C’est un problème majeur dans le lupus car le risque de faire un infarctus du myocarde, de développer une insuffisance cardiaque ou des problèmes cérébraux est de 2 à 3 fois plus élevé que dans la population générale.
N.B. Le cholestérol est transporté dans le sang par l’intermédiaire de protéines, les lipoprotéines. Il existe deux sortes de lipoprotéines : les LDL, lipoprotéines de petite densité qui ont pour nom les low density lipoprotein et les HDL, lipoprotéines de haute densité qui ont pour nom les High Density Lipoprotein.

2. Quels examens peuvent déterminer si le lupus touche le cœur ?

En pratique, les examens ne sont demandés que quand il y a des symptômes. Une atteinte des coronaires se traduira par un essoufflement à l’effort, une douleur ou une impression de constriction à la poitrine qui s’atténuera au repos ou à la prise de trinitrine. Un électrocardiogramme, une épreuve d’effort, une radio et un échocardiogramme sont les examens qui pourront évaluer la fonction cardiaque dans un premier temps. Dans un deuxième temps, une coronographie sera demandé pour déterminer l’étendue des lésions. Lorsqu’une douleur aigue apparaît ou augmente en position couchée, le diagnostic se penchera plutôt vers une péricardite et une échographie pourra évaluer la quantité de liquide autour du cœur.

3. Faut-il encourager l’évaluation préventive de la fonction cardiaque chez les malades lupiques ?

La fonction cardiaque devrait être contrôlée régulièrement chez les malades lupiques par un ECG, un échocardiogramme et une épreuve d’effort. Il faut aussi évaluer les facteurs de risques comme l’hypertension, la dyslipidémie, l’obésité, le tabagisme. Ces facteurs peuvent être diminués en traitant l’hypertension, l’hypercholestérolémie, en encourageant la perte de poids et/ou l’arrêt du tabac.

4. Après une atteinte rénale par le lupus, la fréquence de l’atteinte cardiaque semble plus élevée, est-ce une réalité ?

Effectivement, après une atteinte rénale par le lupus, le risque cardiovasculaire augmente et cela, à cause de différents facteurs. Tout d’abord, l’atteinte rénale est une des atteintes les plus sévères du lupus et s’accompagne d’une exacerbation du système inflammatoire. De plus, la fuite des protéines due à l’atteinte rénale provoque un déséquilibre dans le sang avec une élévation du mauvais cholestérol augmentant ainsi le risque de boucher une artère. Et pour finir, le traitement de l’atteinte rénale lupique demande de hauts dosages de cortisone, cortisone qui va provoquer un risque plus élevé de prise de poids, un déséquilibre lipidique avec augmentation du mauvais cholestérol ainsi qu’une résistance au sucre avec risque de diabète qui va renforcer l’élévation du mauvais cholestérol. Il faut noter que l’on retrouve ce risque augmenté d’atteinte cardiovasculaire chez les malades qui ont une atteinte rénale ou même chez les transplantés sans l’intervention du lupus.

5. Le lupus peut-il augmenter le taux de cholestérol ?

La maladie du lupus, en activant l’inflammation, change le profil lipidique en augmentant les LDL (mauvais cholestérol) et en diminuant les HDL (bon cholestérol) dans le sang. De plus, les traitements à base de cortisone accentuent ce déséquilibre, soit par action directe sur les lipides ou indirectement par la prise de poids.

6. L’hypertension pulmonaire est-elle une complication fréquente du lupus ? Peut-on la prévenir ?

L’hypertension pulmonaire n’est pas une complication fréquente du lupus, loin de là et heureusement. C’est le résultat d’une hyperpression dans les vaisseaux amenant le sang dans les poumons pour y être oxygéné. La cause est une atteinte inflammatoire du tissu interstitiel pulmonaire et/ou une embolie pulmonaire. Une apnée obstructive du sommeil peut être également à l’origine de cette hypertension. On ne peut pas la prévenir et le traitement sera symptomatique.
Remarque : l’hypertension pulmonaire est une hypertension localisée aux poumons. Il ne faut pas la confondre avec l’hypertension artérielle qui touche l’ensemble du corps.

7. J’ai souvent des pleurésies et j’ai peur que cette inflammation puisse masquer une atteinte cardiaque. Comment pourrais-je faire la différence ?

Une pleurésie est une inflammation de la plèvre qui est une enveloppe qui entoure le poumon. Elle s’accompagne dans le lupus souvent de liquide qu’on appelle épanchement. Le symptôme principal est une douleur aigue thoracique surtout lors de l’inspiration profonde (également lorsqu’on tousse).
Lors d’une atteinte des coronaires, la douleur est plutôt décrite comme une oppression, une constriction au niveau de la poitrine avec une sensation d’essoufflement, de manque d’air survenant lors d’un effort.
Il faut signaler à votre médecin si vous avez la sensation que les symptômes sont différents afin que le diagnostique puisse être plus rapidement posé.

8. J’ai des extrasystoles ventriculaires qui sont contrôlés par des médicaments.
J’ai lu dans des études qu’il était possible que des affections rhumatismales comme le lupus, pourraient donner des troubles de la conduction cardiaque.
Mais d’après le cardiologue, il n’y aurait aucune corrélation, qu’en est-il exactement ?

Les extrasystoles ventriculaires ne sont pas l’apanage des malades lupiques. En règle générale, on les retrouve plutôt chez des malades sans lupus. Ils ne sont pas liés à la maladie. Les troubles de la conduction qui vont de la simple arythmie, en passant par les extrasystoles peuvent dans les cas sévères être à l’origine d’un rythme beaucoup trop lent pouvant aller jusqu’au blocage.
Cependant, l’atteinte de la conduction électrique cardiaque peut être liée au lupus dans le lupus néonatal. Pour cela, il faut que la maman ait un certain type auto-anticorps : les anti-SSa/Ro et les anti-SSb/La. Ces auto-anticorps maternels peuvent passer la barrière placentaire et attaquer le système électrique du fœtus. Ces anticorps peuvent aussi se retrouver dans le syndrome de Sjögren. Dans le cas où la maman possède ces anticorps, il faudra surveiller très étroitement la grossesse et faire un monitoring fœtal dès la 16 ème semaine. Et malheureusement, le risque de devoir implanter un pace-maker au bébé est aussi nettement augmenté. De là, le taux de mortalité fœtale et périnatale est plus élevé que dans les lupus sans ces auto-anticorps.

9. Comment le syndrome antiphospholipides peut-il influencer les atteintes cardiaques ? Et quel est le meilleur moyen de prévention ?

Le syndrome antiphospholipides est lié au risque de faire des thromboses, phénomène du à la présence d’auto-anticorps antiphospholipides qui augmente la coagulation au niveau des parois des vaisseaux. Cependant, beaucoup de personnes qui ont ces auto anticorps (et qui ne sont pas nécessairement lupiques) ne font jamais de thromboses. Il faut donc majorer ce risque avec d’autres facteurs comme le fait de fumer, d’avoir une pathologie rénale, d’utiliser des contraceptifs à base d’oestrogènes, de présenter un profil lipidique défavorable comme avoir trop de mauvais cholestérol. On peut donc diminuer le risque cardio-vasculaires en diminuant les facteurs prothrombiques cités précédemment (arrêt du tabac, en changeant de mode de contraception…etc), en mangeant équilibré et en faisant de l’exercice régulièrement.

10. Ma fille de 10 ans souffre du lupus depuis 4 ans et est stabilisée depuis 2 ans grâce à son traitement comprenant du Cell Cept, Plaquenil et cortisone. Existe –t-il un taux optimal de cholestérol à atteindre pour les enfants lupiques afin de les protéger contre les problèmes cardio-vasculaires ultérieures. Ceci en sachant que ma fille a des facteurs aggravants comme la présence d’anticorps antiphospholipides et anti cardiolipines.

Pour le moment, il n’existe pas de « guidelines » (règles) à suivre, ceci aussi bien pour les enfants que pour les adultes. Cependant on considère qu’il faut que la balance entre le bon cholestérol (HDL) et le mauvais cholestérol (LDL) doit pencher du bon côté. Pour se faire, manger équilibré, faire du sport régulièrement sont recommandés, ceci bien avant de prendre des médicaments. Le fait d’avoir un syndrome antiphospholipides associé ne signifie pas nécessairement que l’on va faire des thromboses (cftur question précédente), d’autres facteurs interviennent dont on ne connaît pas encore toujours l’importance. Il faut souligner que la prise de petite dose d’aspirine n’a pas pu prouver son efficacité dans les études randomisées contre la survenue de thrombose dans ces cas-là.

11. J’ai un prolapsus valvulaire mitrale (valve mitrale qui ne ferme pas bien permettant le retour du sang du ventricule à l’oreillette lors de la contraction cardiaque provoquant ainsi une fuite et une perte d’efficacité) et qui devra être opéré. Est-ce fréquent d’avoir ce problème dans le lupus ?

L’endocardite de LIbman-Sack est une atteinte NON infectieuse des valvules cardiaques. Elle se retrouve chez 10% des lupiques, dans les syndromes antiphopholipides ainsi que dans d’autres maladies inflammatoires. Elle atteint le plus souvent la valvule mitrale, valvule qui peut présenter des lésions allant du simple épaississement jusqu’à des nodules ou « végétations ». Celles-ci peuvent en évoluant être à l’origine d’une fuite ou d’un rétrécissement de la valvule. Ce phénomène est accentué par la colonisation de bactéries provoquant une altération de la fonction cardiaque et nécessitant le remplacement chirurgical de la valve.
Cette anomalie doit donc faire l’objet d’une attention particulière, surtout si on est sous corticoïdes ou immunosuppresseurs lors d’intervention dentaires ou chirurgicales car elle est la cible préférentielle de certaines bactéries. C’est pourquoi une couverture antibiotique doit être instaurée en prévention lors de ces interventions.

12. Pouvez-vous nous expliquer quels sont les autres médicaments utilisés avec la cortisone pour traiter la péricardite lupique ?

La péricardite est l’inflammation de l’enveloppe (péricarde) qui entoure le cœur. Elle est très fréquente dans le lupus systémique, environ un tiers des lupiques présenteront une péricardite au cours de leur maladie. Comme traitement, on donne de la cortisone mais aussi des anti-inflammatoires non stéroïdiens comme ibuprofen. Cependant, si vous avez des péricardites à répétition, il faut prescrire des immunosuppresseurs, immunosuppresseurs permettant une épargne cortisonique.

13. Mon conjoint a un lupus et a débuté récemment un traitement contre son hypertension. Malheureusement, le médicament prescrit ,le zestril, provoque de la toux et son médecin qu’il prenne du propanolol à la place. Dans la notice, il est marqué que ce médicament peut induire un lupus, que pouvez dire à ce sujet et que doit-il faire ?

Certains médicaments peuvent provoquer l’apparition de symptômes suggérant le lupus mais cela se fait par d’autres mécanismes que dans la maladie lupique. Si votre conjoint ne souffre pas d’asthme ou de syndrome de Raynaud, il n’y a aucune contre-indication à ce qu’il prenne ce béta-bloquant.


14. Cela fait depuis 18 ans que je vis avec le lupus et j’ai un taux élevé de cholestérol total ainsi que les LDL. Existe-t-il des médicaments qui sont meilleurs que d’autres pour diminuer les lipides sanguins dans le lupus ?
Est-ce que l’effet anti-inflammatoire des statines peut intervenir dans ce processus ?

Les statines (comme la simvastatine, atorvastatine, rosuvastatine) sont de bons hypolipémiants pour traiter les problèmes d’hyperlipidémie. Le mieux est d’accompagner la prise de ces médicaments avec un changement de vie plus sain comme manger équilibré et faire des exercices physiques quotidiennement. Les statines ont effectivement un effet anti-inflammatoire
bénéfique qui a été démontré chez des personnes ne souffrant pas de lupus. Cela n’a pas encore été étudié dans le groupe des malades lupiques.

15. Ce n’est pas toujours facile pour un malade lupique de suivre un programme d’exercices pour préserver sa santé cardiaque lorsqu’il souffre beaucoup au niveau des articulations et des muscles. Quels types d’exercices pouvez-vous conseiller dans ce cas là ?

Pour maintenir votre cœur en bonne santé, on peut recommander des exercices aérobiques comme la marche, marche assez rapide pour augmenter votre rythme cardiaque mais pas trop, il ne faut pas que cela vous empêche de pouvoir parler. Cependant, cela peut être difficilement réalisable quand on souffre des articulations. Dans ces cas là, je recommande de marcher dans l’eau, à la piscine, le plus vite possible avant l’apparition de douleur. La flottabilité réduit le poids sur les articulations et celles-ci sont moins sollicitées. De plus, marcher contre la résistance de l’eau tonifie les muscles. Cependant, il y des jours où même cela n’est pas possible, alors, je conseille le pilates qui renforce et tonifie le muscle cardiaque.

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